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TRIBUNE : les dysfonctionnements du service civique dans les écoles

Soucieuse de promouvoir le service civique (missions pour les jeunes), j'ai contacté les établissements scolaires du Valenciennois pour faire le point sur leurs éventuelles campagnes de recrutement. J'ai découvert avec surprise que beaucoup d'entre eux connaissaient de grosses difficultés à mener à bien cette procédure et que pour certains elle exacerbait même un certain malaise voire une détresse face à la quantité de travail à mener dans les écoles, en raison du contexte sanitaire que nous connaissons. 

Après avoir aidé au dénouement de quelques situations, j'ai souhaité alerter par une tribune, cosignée par une vingtaine de collègues, le gouvernement sur les dysfonctionnement du recrutement de volontaires au sein des écoles et voulu proposer 6 pistes de solution pour faciliter les futures campagnes de recrutement. 

 

Tribune au sujet des dysfonctionnements du recrutement de volontaires en service civique dans les établissements scolaires

  

Béatrice Descamps, député du Nord

Secrétaire de la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation

 

Par souci de la réussite du dispositif de service civique, qui permet à notre jeunesse, que la crise sanitaire a fortement malmenée, de trouver utilité, sens et orientation par une mission d’intérêt général, j’avais transmis à ce sujet de la documentation aux quelques 80 directeurs d’école, principaux de collège et proviseurs de lycée de ma circonscription valenciennoise.

Quelle ne fut pas mon indignation de recevoir non pas un, trois, cinq messages mais une trentaine de témoignages révoltés faisant part de profonds dysfonctionnements dans les procédures de recrutement des volontaires en service civique. Sur 25 procédures ayant fait l’objet d’un témoignage, 16 se sont soldées par un échec.

La situation valenciennoise traduit sans nul doute un dysfonctionnement plus global du recrutement de volontaires en service civique au sein des établissements scolaires français.

Le contexte de crise sanitaire alourdit encore la charge des chefs d’établissement et de leurs équipes, puisqu’ils doivent gérer les protocoles sanitaires, les absences d’élèves et d’enseignants, et tous les aléas liés à la crise. Dans ce contexte, la perspective d’une aide, d’un soutien, par l’intermédiaire d’un jeune, pour mener à bien les activités est non seulement bienvenue, mais essentielle.

Les dysfonctionnements signalés sont bien souvent les mêmes :

  • Un temps d’obtention du contrat de plusieurs mois (parfois pour aboutir à un refus !) dans une année scolaire donc bien entamée, sans aucun suivi de l’avancée du dossier ;
  • Un manque d’information en amont, qui conduit parfois à un échec des procédures (impossibilité de cumul par exemple) ;
  • Des difficultés à trouver des candidats ;
  • Une durée de contrat qui ne couvre pas toute l’année scolaire ;
  • L’obligation pour les directeurs de procéder au recrutement et aux étapes administratives par leurs propres moyens – alors qu’ils manquent déjà cruellement de temps !

Les directeurs d’école ayant réussi l’exploit d’accueillir un jeune en service civique en sont très heureux ; ils signalent tous la motivation, le sérieux des volontaires, ainsi que la confiance qui les lient.

À la suite de ces remontées de terrain, je formule à l’adresse de M. le Ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, et à l’adresse de Mme la Secrétaire d’Etat à la Jeunesse et à l’Engagement, six propositions pour améliorer le dispositif à l’avenir et le rendre réellement pertinent dans le cadre des établissements scolaires.

Proposition 1 : mettre à disposition des écoles une documentation claire, synthétique et uniformisée sur l’ensemble du territoire, afin de répondre à l’ensemble des questions types et de signaler en amont les impossibilités de recrutement (personnes ayant déjà un emploi, animateurs périscolaires, etc.) ;

Proposition 2 : adapter la durée des contrats au rythme scolaire. Les contrats en service civique au sein des écoles ont une durée moyenne de 7 mois (de novembre à mai), ce qui ne permet pas de couvrir deux périodes très intenses en termes d’activité dans l’école, à savoir la rentrée de septembre et la fin de l’année scolaire. Quel que soit le moment où il débute, le contrat en service civique devrait pouvoir courir jusqu’à la fin de l’année scolaire. À l’inverse, ces contrats devraient également pouvoir être souscrits pour des durées plus courtes, en fonction des besoins et de la disponibilité des candidats ;

Proposition 3 : garantir un suivi de l’avancée des dossiers. Les écoles sont dans l’obligation d’attendre plusieurs mois (parfois 6 mois) sans aucune nouvelle malgré leurs relances (pour certains, ils n’auront jamais de retour sur leur demande). On note une situation beaucoup plus satisfaisante pour les écoles privées, pour lesquelles le recrutement est géré par un organisme de gestion qui se charge des démarches et se montre très réactif.

Proposition 4 : permettre aux animateurs périscolaires de contracter un volontariat en service civique. Très souvent, ils sont le premier choix des directeurs d’école car le lien de confiance est déjà établi au sein de l’école, avec l’équipe et les enfants. Beaucoup de directeurs souhaitent donner plus de tâches à ces animateurs et se retrouvent confrontés à des refus injustifiés. 

Proposition 5 : mettre en place une plateforme dédiée au sein des services académiques chargée spécialement de traiter les dossiers de recrutement en service civique et proposant des interlocuteurs avertis et réactifs aux écoles, de façon à alléger leur charge de travail. Ces plateformes se chargeraient du lien avec les candidats, notamment. Au vu de la gestion actuelle pour le moins chaotique, je n’ose imaginer qu’un tel dispositif existe.

Proposition 6 : faire preuve de davantage de souplesse au niveau des horaires dans le cadre du recrutement en service civique afin de permettre des interventions de volontaires sur certains moments de la journée, ou pour ne pas priver de service civique des jeunes qui n’auraient pas d’emploi du temps pérenne.

À ces conditions, le service civique pourrait remplir sa mission de soutien efficacement au sein des écoles, bien que le dispositif reste insuffisant face à la détresse profonde des chefs d’établissements et des enseignants, qui méritent des décisions courageuses et des mesures réelles.

 

 

Paris, le 10 décembre 2020

 

Béatrice Descamps, député du Nord

Grégory Labille, député de la Somme

Yannick Haury, député de la Loire

Frédéric Reiss, député du Bas-Rhin

Pierre Morel-A-L’Huissier, député de la Lozère

Meyer Habib, député des Français de l’Etranger

Michel Zumkeller, député du territoire de Belfort

Christophe Naegelen, député des Vosges

Agnès Thill, député de l’Oise

Jean-Christophe Lagarde, député de Seine-Saint-Denis

Paul Christophe, député du Nord

Guy Bricout, député du Nord

Sophie Auconie, député d’Indre-et-Loire

Martine Wonner, député du Bas-Rhin

Robert Therry, député du Pas-de-Calais

Constance Le Grip, député des Hauts-de-Seine

Nicole Sanquer, député de Polynésie française

Olivier Falorni, député de Charente-Maritime

Julien Dive, député de l’Aisne

 

 

 

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